Le chevalier blanc.

Voici une question intéressante posée par un membre du forum SS : 

« Je voulais juste savoir : avec qui parlez-vous des aspects de la séduction en dehors de ce site ? Je parle ici du « jeu de séduction » dans le sens le plus large du terme, en incluant la drague, mais aussi l’estime de soi, les manières de garder une relation saine, le rôle des hommes et des femmes dans la société, etc.

Lorsque j’ai exprimé en public les points de vues qui sont préconisés ici, j’ai presque toujours rencontré une réaction négative. J’ai trois à quatre bons amis masculins qui s’intéressent à la drague (qui ont lu « the Mystery Method » par exemple) et ils ont adoré. Mais ces amis sont l’exception plutôt que la règle. Mes parents (un père « beta » et une mère qui ne veut que me contrôler) pensent que mon attitude envers les femmes est sexiste et que mon opinion sur les coups d’un soir est « dégoutante ». A peu près tout le monde que je connais souscrit à une vision « Disney / âme sœur » des relations hommes-femmes, et certaines personnes de mon entourage (j’ai 21 ans) commencent même à s’installer et se marier. Que Dieu les aide. Parler aux filles, lorsqu’on est au lit avec elles, de ce qu’elles trouvent attrayant chez un homme est une chose intéressante, ne serait-ce que pour voir dans quelles mesures elles se mentent à elles-mêmes, mais c’est finalement contre-productif, puisqu’une femme s’attend (tacitement) à ce qu’un homme sache exprimer sa sexualité. 

Pouvons-nous, en tant qu’hommes, parler de ces choses en public ? Quelles sont vos expériences ? ».

Avant de commencer, permettez-moi de dire que je pense que c’est encourageant de voir une question aussi perspicace posée par un homme si jeune.

Morpheus : la matrice est un système, Néo. Ce système est notre ennemi. Mais quand tu es à l’intérieur, tu regardes autour de toi, qu’est-ce que tu vois ? Des hommes d’affaires, des enseignants, des avocats, des charpentiers. C’est l’esprit même de ces gens que nous essayons de sauver. Mais jusqu’à ce que nous le fassions, ces gens font toujours partie de ce système et cela fait d’eux notre ennemi. Tu dois comprendre que la plupart de ces gens ne sont pas prêts à être débranchés. Et beaucoup d’entre eux sont tellement assaillis, si désespérément dépendant du système, qu’ils se battront pour le protéger.


Le premier venu aléatoire qui peut entendre votre conversation sur le jeu de la séduction, sur votre « changement » sur la façon de voir les relations entre les sexes, sur vos observations critiques sur ce que les femmes « sont » objectivement, etc. attends tous les jours une occasion pour vous « corriger » d’une manière aussi publique et visible que possible. Cet idiot moyen, qui a été nourri via un régime alimentaire régulier fait de nobles intentions, avec l’ambition d’obtenir l’intimité d’une femme à travers sa forme unique de chevalerie ; ce gars-là, ne cherche qu’une occasion de prouver sa qualité en redressant publiquement un « méchant » comme vous. Même dans les conditions de l’anonymat relatif (comme internet), il va encore s’accrocher à cette chance de prouver son caractère unique juste pour que le hasard face en sorte qu’une femme puisse lire sa rebuffade et être inexplicablement attirée par lui. 

Ce sont les tenants et les aboutissants de l’homme « beta » dit « chevalier blanc ». Il est préférable de supposer que la plupart des hommes qui observent votre jeu de séduction, ou qui en viennent carrément à en parler, vont se mettre du côté de l’impératif féminin, en quelque sorte par défaut. Pour les praticiens du « jeu de séduction beta » (c’est-à-dire près de 90 % des hommes) c’est une occasion unique de s’identifier avec les femmes et de s’engager dans les mêmes conventions d’humiliation que les femmes utilisent, sans la crainte de passer pour artificiel. 

Ce sont ici les premiers aspects, mais accompagnons Alice un peu plus loin, car le trou du lapin est plus profond que cela. Pour que le jeu de séduction beta de notre noble chevalier blanc puisse fonctionner, il faut qu’un système entier soit mis en place. Ce système dépend de la façon dont il réaffirme sa compréhension (supposée) de la meilleure façon d’atteindre l’intimité d’une femme (le sexe). Il doit réaffirmer cette présomption en la défendant, et chercher des occasions de montrer qu’il adhère à l’impératif féminin (ou à la version de l’impératif qu’on lui a appris à croire). Son jeu, l’identité dans laquelle il a investi son ego, est littéralement dépendant de ce système. Ainsi, non seulement il défend son jeu et son Ego, mais il défend aussi l’architecture sociale rend justement son jeu d’homme beta possible. 

Vous voyez, quand un idiot s’accroche aux schémas mentaux qui composent un état d’esprit de naïf, cela nécessite un besoin constant d’affirmation, de réaffirmation et de renforcement, en particulier à la lumière d’un manque flagrant de succès vérifiables avec les femmes, tout en s’accrochant à cet état d’esprit et en se comportant conformément à cet état d’esprit. Les idiots sont comme des crabes dans un tonneau – une fois que l’on est arrivé au sommet, à force de grimper, voilà qu’un autre l’entraine de nouveau vers le fond. Un idiot a besoin des autres idiots pour expliquer son manque évident de succès. Il a besoin d’autres idiots pour lui dire : « Ne t’inquiète pas, soit juste toi-même » ou « Elle n’est tout simplement pas une fille bien parce qu’elle ne réalise pas à quel point tu es un chic type ». 

Ainsi [et paradoxalement], lorsqu’un idiot obtient enfin un deuxième rendez-vous et arrive finalement à baiser, cela valide de façon ultime son état d’esprit. « Tu vois ! Tu n’avais qu’à être un gars patient, gentil et compréhensif et voilà que l’âme sœur est venue à toi ! ». C’est alors que commence la phase bien-pensante, et il peut commencer à dire à ses amis dragueurs que le « jeu de séduction beta » fonctionne, et qu’il arriver « à choper » sans avoir besoin de toutes ces conneries que l’on nomme « masculinité positive ». En réalité, il rationalise toutes les conditions qui l’ont amené à obtenir une petite amie, en oubliant les défauts fondamentaux de la femme qui le baise, mais cela ne l’empêche pas de se réclamer d’une position morale élevée. Sa longue attente est terminée et il a finalement prouver que le difficile travail de « chevalier blanc » a finalement payé. 


Source : « Enter White Knight » publié par Rollo Tomassi le 20 septembre 2011.

Illustration : Maria Pop.