Bronze Age Mindset. Traduction Française (2).

Nietzsche décrit ce qu’il advient de ces chevaux, paissant tranquillement dans une vaste plaine, lorsque l’étalon dominant se trouve soudain emparé par un esprit sauvage : il se met alors à galoper en tous sens, entraînant à sa suite tout le troupeau dans un grand élan de puissance et de liberté. J’ai moi-même été témoin de ce genre de phénomène : je me tenais un jour au pied d’une chute d’eau où s’y réunissaient de nombreux oiseaux et toutes sortes d’animaux pour s’y abreuver. J’imagine qu’à travers les cycles de l’histoire, ce lieu a perduré, et les oiseaux, témoins silencieux des pérégrinations humaines, en ont gardé mémoire par les éons, revenant toujours au même endroit. Cette cascade était si vaste qu’il suffisait qu’une légère brise se lève pour vaporiser de fines gouttelettes qui s’élevaient dans le ciel, et, lorsqu’un rayon de soleil se frayait un passage entre les nuages, une multitude de petits arcs-en-ciel apparaissaient alors, et des myriades d’oiseaux de sortir brusquement des anfractuosités rocheuses, dansant et virevoltant dans les airs, célébrant avec excitation ces généreux jaillissements, étincelants de couleurs. Homère narre que dans une prairie d’Asie, des tribus d’oies sauvages, de grues et cygnes au long cou se glorifiaient de la puissance de leurs ailes en atterrissant dans de grands fracas sur la plaine de Skamandrian, entre les rivières. Se demande-t-on à quoi sert un tel comportement au regard de l’instinct de survie ou de la perpétuation de l’espèce ? Je ne doute pas qu’un pédant binoclard inventera une histoire pour tenter d’expliquer ces faits. Mais au fond, ces comportements ne nous sont en réalité pas si étrangers. Peut-être qu’en des temps plus fastes, vous étiez libre d’agir et de ressentir la même chose : car au fond, quel est le rapport avec la survie et la reproduction ? Ceux qui veulent y voir ce genre de pesante nécessité ne révèlent que la lourdeur de leur propre esprit ; leur vision mesquine et étriquée qu’ils se forment de la vie… alors qu’en vérité, la vie, lorsqu’elle est libre, est pleine d’abondance, de jaillissements, connaît le luxe, la surabondance et ne renâcle pas au gaspillage… la survie et la reproduction ne sont que des manifestations d’ordre secondaire.


Traduction par Raffaello Bellino. 

Révision par Neskio.