Le Serpent Enroulé (21).

Dans cette série d’articles, je vous propose ma traduction en français du livre « The Coiled Serpent: A Philosophy of Conservation and Transmutation of Reproductive Energy », de C. J. Van Vliet.

Pour revenir au plan général de l’ouvrage, cliquez ici.


Chapitre précédent : 

19. Le mariage.


XX

Âmes-sœurs.

La théorie de l’âme sœur dispose que, quelque part dans l’univers, chaque âme humaine a son équivalent supplémentaire avec lequel elle ne faisait qu’un à l’origine et avec lequel elle doit chercher à être réunie. Et cela est généralement interprété comme une réunion dans la chair. 

Cette théorie se base apparemment sur l’hypothèse trouvée dans divers enseignements anciens selon laquelle, à une certaine époque, il n’y avait pas de corps masculins et féminins séparés, mais que chaque corps était complet en lui-même, auto-reproductif, contenant des éléments masculins et féminins également actifs, comme c’est encore le cas pour de nombreuses plantes. Cette théorie suggère que la nature, en créant des sexes séparés, a soudainement divisé le corps hermaphrodite en deux moitiés, divisant en même temps l’âme qui l’habite en deux unités distinctes. 

Il est toutefois plus probable que la nature ait travaillé lentement, qu’elle ait modifié la forme physique progressivement au fil des générations qui se sont succédé à l’infini, sans affecter en aucune façon l’âme. Dans une série de changements, les éléments féminins des corps sont devenus primordiaux, laissant les rudiments masculins inactifs ; dans l’autre, c’est le processus inverse qui a dû se produire. La preuve de ce processus évolutif est visible dans les organes vestigiaux des corps de chaque sexe. Dans tous les cas, l’âme qui nous habite est restée ce qu’elle était : un être complet comme avant, utilisant temporairement un corps unisexe au lieu d’un corps sexué. Ce processus naturel ne présente pas la moindre base logique pour l’idée de l’âme-sœur. 

Une autre source à partir de laquelle la théorie de l’âme sœur a pu naître est le concept métaphysique peu compris connu sous le nom de « mariage mystique ». Les mystiques chrétiens l’ont décrit symboliquement comme le mariage avec le Christ (amour suprême). Les mystiques philosophiques en ont parlé comme de leur mariage avec Sophia (la sagesse suprême). Les mystiques mahométans l’ont décrit dans les termes les plus élogieux comme l’union avec le Bien-Aimé (l’esprit). Dans tous les cas, le langage utilisé pour réaliser la simulation a souvent été de nature à induire en erreur le lecteur qui n’a aucune compréhension des traditions mystiques, et à laisser l’impression qu’il s’agissait en fait d’une union personnelle et sexuelle avec une autre âme.

Mais le « mariage mystique » ne fait pas référence à une quelconque union personnelle, pas même d’âme à âme. Il personnifie l’union impersonnelle et immaculée de l’âme avec l’esprit, avec ce que l’on peut appeler la contrepartie divine de l’âme. Il dépeint la réunion de l’âme avec ce dont elle est issue et dont elle n’est qu’une partie individualisée. Le « mariage mystique » symbolise l’union de l’âme avec son moi supérieur, avec l’essence divine qui réside en chacun. Le résultat de cette union spirituelle, intérieure, est la naissance de l’homme parfait, doté d’un amour parfait et d’une sagesse parfaite. C’est l’union que chaque être humain devra rechercher et réaliser au fur et à mesure de l’évolution. Mais cette union avec l’esprit ne peut avoir lieu tant qu’il subsiste une tendance à la gratification sexuelle. 

Le sexe doit être transcendé avant que l’âme puisse connaître l’esprit. 

Quelle que soit la source à laquelle elle a été empruntée, la théorie de l’âme sœur confond l’idée de l’attraction de l’âme avec celle de l’attraction sexuelle, car elle recherche un partenaire sexuel sur le plan de l’âme. Mais l’âme elle-même est asexuée. Toutes les âmes sont de la même nature… elles ne sont ni mâles, ni femelles. Les âmes ne se propagent pas ; elles n’ont donc besoin d’aucune faculté de reproduction, d’aucun sexe. 

Il n’est donc pas étonnant qu’en règle générale, ceux qui cherchent un compagnon « d’en haut » soient misérablement trompés. S’ils étaient prêts à purifier leur relation sexuelle, ils pourraient trouver un compagnon d’âme durable, qui ne peut être que sans sexe. Mais si les soi-disant âmes sœurs s’attardent sur le plan sexuel, elles ne trouvent bientôt plus qu’une communion sexuelle sans âme.

La théorie des âmes-sœurs n’a pas été démontrée comme étant réalisable dans la pratique. Y a-t-il un seul cas où ceux qui se sont unis parce qu’ils pensaient être des âmes sœurs, se sont avérés être les moitiés inséparables d’une unité ? Leur lien survit rarement au stade de la satiété sexuelle, qui ne manque jamais d’arriver à moins que le sexe ne soit surmonté. Au mieux, les prétendues âmes sœurs ne sont ni meilleures ni pires que n’importe quel autre couple. Mais trop souvent, l’âme sœur n’est qu’une excuse pour ceux qui veulent passer d’un compagnon à un autre. 

Cependant, en dehors des théories douteuses sur les âmes sœurs, une forte attraction peut exister entre une âme et une autre, entre des âmes de même niveau et aussi évoluées. Il n’y a pas de plus grand bienfait pour une âme que d’être étroitement liée à une autre âme semblable. Mais cela ne peut avoir lieu que lorsque la pureté a été établie à un point tel que l’âme n’aspire plus aux plaisirs séduisants des sens. Dans un lien d’âme à âme, le sexe ne joue aucun rôle. 

L’attraction sexuelle doit être surmontée avant que l’âme puisse connaître l’âme.