Les états de l’être dans la Tradition : l’âme, l’esprit et le corps. 

Selon la Tradition, tous les Êtres trouvent leur origine dans un Principe primordial et unitaire. Ce Principe a été diversement décrit comme Archétype, Être Suprême, Volonté Divine, Moteur Premier, etc. Le Principe Suprême est universel et indéterminé : il représente l’unité absolue au-delà de toute qualification et distinction, la source commune de la matière et de l’esprit qui les transcende tous deux. 

Le Principe métaphysique est à la fois Un et Tout : il est l’Un qui est Tout et le Tout qui est Un. Le Principe résout toutes les oppositions ; en tant qu’origine qui précède toutes choses, il supprime la multiplicité en unissant et en fusionnant toutes les dichotomies (bien/mal, amour/haine, lumière/obscurité, début/fin, etc.). 

Le Principe métaphysique ne peut être compris en termes rationnels, car la raison est conditionnée par le temps et donc inadaptée à la compréhension de ce qui est éternel. Malgré leurs efforts, les scientifiques modernes sont perdus face à l’harmonie et à l’ordre du cosmos. Le Principe est « sans dualité », et en dehors duquel il n’y a rien, ni manifesté ni non manifesté. Il est en fait impossible de décrire le Principe, car il ne possède ni nom ni forme : par sa propre nature, il ne peut être exprimé, car toute définition le limiterait. Il vaudrait mieux dire du Principe, en tant que racine de toutes choses, que « ce n’est pas cela » plutôt que d’en donner une représentation fausse et partielle. 

Le Principe se situe à un niveau invisible, absolu, et pourtant il opère dans le monde comme un modèle divin et une volonté divine. Ce deuxième niveau universel est celui de l’âme, entité supranaturelle située au-dessus de tous les êtres individuels, qu’ils soient matériels ou psychiques. Tout en transcendant les formes individuelles, l’âme appartient aussi aux créatures individuelles, à l’aide de laquelle elle permet de participer au divin, c’est-à-dire à l’Être universel, principe de toute existence. Les deux autres modes d’existence appartiennent au contraire au niveau de l’individualité : l’un est l’esprit, l’autre le corps. 

L’esprit – ou psyché – représente le composé subtil des forces vitales immatérielles ; il comprend les souvenirs, les impulsions, les sentiments, les perceptions, le plaisir, la douleur, la peur, l’amour, la haine, les habitudes, les désirs, les instincts, etc. Le corps physique est la substance matérielle brute, l’enveloppe extérieure de l’être que possèdent les formes d’existence terrestres et matérielles. 

Pour l’homme de la Tradition, l’individu incarne une manifestation transitoire et contingente de l’être véritable. La vie humaine n’est donc qu’un état parmi une multitude indéfinie d’états appartenant au même être, lequel est entièrement indépendant de toutes ses manifestations. 

La combinaison du corps et de l’âme donne naissance à l’ego (l’individualité ou le moi contingent), qui représente une projection horizontale de l’homme. L’esprit, en revanche, constitue la personnalité, le Moi supérieur ou le Soi de l’homme : son noyau métaphysique et éternel, sa dimension verticale et son être authentique. Selon cette division tripartite de la réalité humaine (âme-esprit-corps), l’homme ignorant est gouverné par les passions : ayant oublié sa vraie nature, il est identifié à l’ego, qui l’enchaîne à sa dimension psycho-physique. 

L’homme de la Tradition ressent donc le besoin d’un développement intérieur. Pour atteindre un tel objectif, l’individu doit travailler avec acharnement au niveau de son propre corps et de son esprit afin de couper les liens qui unissent l’humanité mortelle. Un processus d’ascèse est nécessaire pour se libérer de toute matérialité en développant la clarté d’esprit et en adoptant une discipline qui est la manifestation visible d’un style acquis et d’un ordre intérieur. Un travail approfondi est nécessaire pour éliminer tous les défauts, tels que l’égoïsme et l’intérêt personnel, et les remplacer par des traits positifs. En opérant sur son corps et son esprit, il est possible pour chaque individu d’atteindre une dimension plus subtile de la vie : la dimension de l’âme.