La Tradition et le sacré. 

La divinité est normalement envisagée par l’homme contemporain comme une entité abstraite et lointaine qui n’est plus présente ou active dans la vie quotidienne. Notre monde est dépouillé de toute sacralité, où tout est sacrifié sur l’autel de la production et de la consommation de masse. 

Le terme « sacré » est utilisé pour désigner non seulement ce qui transcende l’homme, le temps et la vie, mais aussi ce qui existe éternellement. Le sacré est donc « ce qui relie la vie terrestre à des forces invisibles supra-naturelles » : un ordre régi par des lois supérieures à l’homme, qui est orienté vers le divin. 

Étymologiquement, le terme « tradition » vient du latin tradere, un verbe formé de trans (= « au-delà ») + dare (= « remettre ») ; il désigne donc l’action de transmettre quelque chose et doit être compris comme « ce qui est transmis ». La tradition ne consiste pas en la conservation ou la consolidation d’apparences extérieures ou de choses dont le sens n’est plus compris : la tradition indique plutôt la transmission directe et efficace d’un patrimoine qui n’est pas humain et dont l’origine est essentiellement spirituelle. L’action traditionnelle signifie une action dynamique : sa transmission suppose un lien entre le donneur et le receveur, ce dernier étant responsable de la perpétuation de l’héritage ancestral. D’une génération à l’autre, cet héritage prend la forme d’un pouvoir ordonnateur qui imprègne l’ensemble de la réalité, transcendant le côté purement matériel et biologique de l’existence. 

Dans ce contexte, il serait correct de parler d’une « transcendance immanente », c’est-à-dire d’une force spirituelle qui opère comme une présence vivante, dynamique et créative à travers les institutions, les cultures, les coutumes, les lois, les religions et autres, faisant des valeurs spirituelles et supra-individuelles l’axe et le point de référence suprême de l’ordre général des choses. Cela permet de transmettre les principes sous-jacents d’une époque à l’autre, de telle sorte que toutes les actions humaines puissent être uniformément dirigées vers le haut, conformément à un idéal général. 

S’identifier aujourd’hui comme un homme de Tradition, c’est s’engager dans la transmission de l’héritage reçu pour le bénéfice des générations futures.