Les Trois Etendards accueille aujourd’hui un nouveau contributeur : Nared Charow. « Pourquoi il faut respecter les filles faciles davantage que les autres » est son premier article publié ici.
Jean-Jacques Goldman, qui a souvent pensé juste, écrivit en 1987 une chanson intitulé « Filles faciles » qui commence à peu près comme ceci :
J’ai une tendresse particulière
Pour ces filles qui n’ont pas d’manières
Les hospitalières, les dociles
Vous les appelez les filles faciles
Celles qui marchandent pas leur corps
Ni pour des mots ni pour de l’or
Pour qui faut pas tout un débat
Ni pour leur haut ni pour leur bas
Les filles faciles sont ces filles décriées qu’un homme (s’il leur plait) peut avoir en un soir, en une nuit, en une après-midi.
Les filles faciles sont ces filles décriées qui peuvent coucher juste parce qu’elles en ont envie à l’instant T.
Les filles faciles sont ces filles décriées qui s’offrent à un homme sans rien lui demander en échange, et sans espérer quoique ce soit d’autre qu’un pur moment de plaisir sensuel.
Les filles faciles sont ces filles décriées qui regardent partir leur amant d’une nuit en se disant que, même s’il ne revient jamais, elles auront au moins passé un bon moment.
Pour les autres filles, les filles « respectables » il n’existe pas de sexe pour le sexe. Leur cul est considéré par elles-mêmes comme ce qu’elles ont de plus précieux, comme leur monnaie d’échange absolue. C’est pourquoi il est hors de question qu’elles en fassent profiter gratuitement qui que ce soit.
Pour coucher avec ces filles respectables, il faut leur faire la promesse, explicite ou implicite, qu’on est prêt à s’engager (y compris financièrement) dans une relation à long terme, dans un projet de vie commun. Une fille «respectable » peut bien sur avoir envie de coucher avec un homme le jour même. Elle refoulera cette envie. L’homme qui la veut devra d’abord lui faire la cour pendant de longues semaines, l’emmener dans des restaurants, des boites de nuit, des voyages, des spectacles, des excursions. En payant, bien évidemment. Au bout d’un certain temps, la fille respectable considérera qu’elle a eu assez de garanties concernant la validité de l’investissement futur de son éventuel partenaire, et commencera à lui offrir, en échange du dit investissement, une prestation sexuelle régulière et de qualité.
Une fois que l’homme aura signé : signé pour le mariage, signé pour la maison, signé pour la voiture, signé pour les enfants, la femme « respectable » aura subitement moins envie de faire l’amour. C’est le fameux « décrochage » féminin au bout d’un ou deux ans de relation, dont les journaux féminins et les sexologues médiatiques continuent de se demander à quoi il peut bien être du…
La fille facile se donne. La fille respectable se vend. Et, par un contresens extraordinaire, c’est la première qui est considérée comme une pute, et la seconde comme le contraire d’une pute.
Nared Charow.
Illustration : Sasha Maslova.