Le phénomène « Incel » n’est ni une idéologie, ni une sous-culture, mais la société a besoin de les définir comme tels.

Le phénomène « Incel » n’est ni une idéologie, ni une sous-culture, mais la société a besoin de les définir comme tels. 

Cela fait maintenant près de deux mois que le monde a pris conscience de l’existence des Incels, à la suite de l’attaque à la fourgonnette menée par Alek Minassian à Toronto. Les médias traditionnels et les médias en ligne ont amplement couvert le sujet, d’une manière plus ou moins approximative, et dénaturant divers aspects du phénomène. De toutes les inexactitudes qui sont répétées en permanence, l’une des plus fréquentes est d’identifier l’incel comme appartenant à un mouvement / une idéologie / une sous-culture. Par exemple, chez « Nero Editions », ils parlent d’ « idéologie incel » ; la page wikipedia en italien dit que le terme « incel » se réfère à « una subcultura sorta su internet » (« une sous-culture qui a surgi sur Internet »), et ainsi de suite, vous pouvez trouver des exemples sans fin.

(Note LTE : dès la première ligne, le wikipédia français commence par « La sous-culture incel »).

Je voudrais clarifier la question une fois pour toutes : être incel est une condition passive. Ce n’est pas quelque chose que vous choisissez, ce n’est pas une idéologie que vous partagez, ce n’est pas un mouvement auquel vous adhérez. Le terme identifie simplement les hommes qui ne parviennent pas à avoir une vie sexuelle (décente). Bien que beaucoup d’incel finissent par partager quelques idées, souvent plus ou moins en contradiction avec la vision dominante du monde dans la société occidentale progressiste d’aujourd’hui, ce n’est pas ce qui les identifie comme tels. Vous pouvez également être la personne la plus féministe dans le monde, mais si vous avez des relations sexuelles seulement avec votre main, ou avec des prostituées, ou même sans payer, mais une fois tous les deux ans et avec des filles si moches que vous avez besoin de regarder leur carte d’identité pour vous assurer que ce sont bien des femmes, vous êtes un incel. Cela n’a rien à voir avec les opinions politiques ou avec l’opinion qu’un homme peut avoir sur les femmes. Le terme lui-même ne devrait d’ailleurs laisser aucun doute : IN-cel, célibataire INVOLONTAIRE. Involontaire : que vous ne choisissez pas. 

(Note LTE : Involontaire (adjectif, XIVe siècle. Emprunté du bas latin involuntarius, de même sens). 1. Qui se fait sans le concours, sans le consentement de la volonté. Les réflexes sont des mouvements involontaires. 2. Qui n’a pas été voulu. Une omission involontaire. Cette critique est un hommage involontaire. Homicide involontaire, homicide par imprudence, par négligence ou maladresse. 3. En parlant d’une personne. Qui, par des circonstances fortuites et sans le vouloir, se trouve participer à une situation, à une action. Le héros involontaire d’un fait divers. Le témoin involontaire d’un drame).

Alors pourquoi cette erreur est-elle si répandue ? Pourquoi tout le monde dénature-t-il ce concept élémentaire ? Simplissime : parce que le phénomène incel se heurte à l’un des piliers idéologiques de la société qui a surgi à la suite de la soi-disant « libération sexuelle ». Ce pilier est la conviction que la suppression des diverses limitations morales, et parfois même légales, que la société a imposées à la vie privée jusqu’à il y a quelques décennies a finalement ouvert à tous la possibilité d’une vie sexuelle épanouissante et heureuse. Maintenant qu’il n’y a plus de règles stupides pour nous limiter, n’importe qui peut faire l’amour jusqu’à ce qu’on ait la nausée. Mais alors comment est-il possible qu’il y ait des gens qui se plaignent d’être forcés au célibat involontaire ? Avec toute la liberté sexuelle qu’il y a aujourd’hui ? Les obstacles qui ont empêché les gens de profiter de leur vie privée ont tous été éliminés, il est inconcevable qu’il y ait des gens qui prétendent qu’ils ne peuvent pas baiser de leur propre choix. Le résultat est un court-circuit idéologique, à partir duquel le défenseur de la société actuelle, une femme ou un homme « pilule bleue », nous sort une explication complètement illogique mais cohérent avec sa vision du monde : définir l’incel, qui est une condition passive et involontaire, comme une action positive, un choix actif, une décision volontaire. Et donc l’incel devient tel parce qu’il choisit d’adhérer à une idéologie, parce qu’il choisit de faire partie d’un groupe, parce qu’il choisit de se conformer aux croyances d’une sous-culture. Et cette idéologie ou sous-culture est généralement également présentée en termes fortement négatifs, en se concentrant sur les deux seuls cas, dans un monde où il y a des millions d’incels qui n’ont jamais blessé une mouche, dans lequel être incel a conduit à des actions violentes, cependant, par des sujets mentalement perturbés. De cette façon, l’incel devient le mal absolu, et le cercle fait un tour complet sur lui-même : « vous ne baisez pas parce que vous êtes des connards ! ». Les fondements idéologiques de la société d’aujourd’hui sont ainsi préservés : n’importe qui peut avoir une bonne vie sexuelle, et si quelqu’un n’a pas de vie sexuelle épanouie, c’est parce qu’il a choisi la haine plutôt que l’amour.

Évidemment, les choses ne sont pas comme ça. Comme je l’ai dit être incel est quelque chose que vous subissez, pas que vous choisissez. Il est probable que la plupart des Incels ne connaissaient même pas ce terme avant les événements de Toronto, et seulement une infime fraction est inscrite dans des forums axés sur cette question. Je crois même que de nombreux incels ne se qualifient pas comme tels, vis-à-vis d’eux-mêmes et vis-à-vis des autres, afin de ne pas être vu comme des sfigati. La vérité est que la fameuse libération sexuelle a effectivement conduit à une augmentation énorme des options sexuelles pour presque toutes les femmes, mais chez les hommes, il a eu des effets pratiques positifs uniquement pour ceux qui possèdent des niveaux suffisants de LMS. Pour d’autres, non seulement cela n’a pas conduit à une amélioration par rapport à la vie sexuelle qu’ils auraient eue dans une société traditionnelle, mais au contraire cela a conduit à une détérioration considérable, et pour les plus malheureux (l’incel, en fait) cela a même conduit à l’annulation totale de toute vie sexuelle. Il y a un désaccord considérable, même au sein des communautés masculinistes, quant au nombre d’incel dans notre société, en partie en raison du fait que les « critères » pour définir ce qu’est un incel ou ce qu’il n’est pas, sont des critères un peu fumeux. La définition la plus stricte identifie comme incel seulement ceux qui n’ont jamais eu de copine, mais cela inclut généralement également ceux qui sont forcés à de longues (années) périodes d’abstinence, entrecoupées peut-être par des relations insatisfaisantes et qui coûtent beaucoup en termes de temps, de fatigue et d’estime de soi. En outre, ce n’est souvent pas une condition qui se déroule tout au long de la vie, car à mesure que nous vieillissons, les revendications des femmes ont tendance à être réduites, et même les gens qui ont été incel pendant de nombreuses années parviennent en quelque sorte, à « s’installer » (après avoir perdu leurs meilleures années de leur vie), et cela rend encore plus difficile les estimations chiffrées. 

Quoi qu’il en soit, nous parlons de quelques dizaines de millions de personnes. Si ce chiffre vous semble énorme, considérez qu’il y a environ un milliard de personnes vivant en Occident, dont presque 200 millions d’hommes entre 18 et 45 ans. (Estimation prudente) si nous considérons que 10 % de ces hommes n’ont pas le LMS suffisant pour avoir une vie sexuelle, nous sommes en train de parler de 20 millions de personnes. Mais bon, mieux vaut se concentrer sur deux personnes perturbées qui ont commis des meurtres, et sur la poignée d’incel qui font du bruit sur internet, cela permet de préserver les dogmes sur lesquels repose la société actuelle.


Source : « Quella degli Incel non è un’Ideologia o Subcultura, ma la Società ha Bisogno di Vederla come tale » publié par Il Redpillatore le 17 juin 2018.