De la bière et des seins.

Je me souviens avoir regardé quelques épisodes de « The Man Show » en 2002 ou 2003. Je terminais mes études à l’époque et, bien que je fusse beaucoup plus âgé que la plupart de mes camarades de l’époque, des fraternités m’ont proposé de me joindre à elles pendant la semaine de « Rush ». Je n’ai jamais accepté les invitations ; le fait que j’avais au moins 10 ans de plus que mon « Bro » le plus âgé ne me convenait pas, et le fait que de travailler plus de 40 heures par semaine ne me laissait pas beaucoup de temps pour m’amusr. Parmi les quelques amis pour lesquels j’avais du temps disponible à l’époque, au moins quatre étaient des membres d’une fraternité et ils adoraient « The Man Show ».

Ces types connaissaient mon intérêt pour les études de genre et pour les études sur la personnalité en psychologie comportementale (ma discipline alors mineure), mais c’était surtout parce que je leur présentais mes idées de telle sorte à ce qu’ils soient d’accord avec ma façon de décrire le comportement des femmes. Ils m’ont innocemment suggéré de regarder The Man Show, en pensant que cela m’intéresserait parce que « c’est enfin une émission pour les mecs ». À l’époque, je disséquais la ridiculisation du masculin et les caricatures des rôles masculins au cinéma et à la télévision, et ces types étaient enthousiastes à propos de ce que j’écrivais et de ce que je leur racontais.

Au début, j’ai trouvé la série assez drôle. J’aime toujours Adam Carola et ses idées sur le genre, et j’y fais toujours référence. Cependant, après avoir regardé l’émission pendant un certain temps, quelque chose n’allait pas bien pour moi. Je n’arrivais pas à mettre le doigt dessus, mais à un moment donné, je me suis dit : « mec, c’est stupide, on ne peut pas faire mieux que ça ? ». Je me suis rendu compte que si c’était un « show pour hommes », alors les hommes étaient, eh bien, un peu stupides.

J’étais déjà bien conscient de l’avilissement des rôles masculins dans les médias populaires (télévision, cinéma, etc.), mais lorsque l’on me propose ce qui était censé être une émission exclusivement masculine, il me semble que la ridiculisation du masculin ne faisait que se réaffirmer. J’utilise The Man Show comme illustration d’une dynamique plus large ici – si tout ce que nous avions à faire c’était de consulter la culture populaire (c’est-à-dire féminisée), pour nous aider à caractériser ce qui est masculin, alors nous étions déjà assez mal lotis, mais il semble que les hommes eux-mêmes étaient presque inconsciemment complices du renforcement de ces caricatures de masculinité, c’est-à-dire de cette vision féminisée de la masculinité.

J’adore le football. Je vous ennuierais probablement à mourir parce que je peux parler des heures sur la prochaine saison et sur l’avant-saison, qui n’arrivera jamais assez tôt. Interrogez-moi sur le base-ball, je vous dirai que j’aime les Dodgers, mais que je ne connais relativement rien du passe-temps américain. Le football, le golf, le tennis, le hockey, je ne pourrais pas tenir une conversation sur aucun de ces sports. J’aime les gros seins (faux ou vrais), j’aime les longues jambes des femmes. Vous savez tous que je travaille dans l’industrie de l’alcool depuis plus de 9 ans, donc j’ai aussi un intérêt direct pour l’alcool. Cependant, ces intérêts naturels ne sont que de petits éléments constitutifs de ce que je suis en tant qu’homme.

Il est vrai que le sexe et l’alcool semblent être les deux principaux éléments contribuant au bonheur humain, mais il y a beaucoup plus pour moi, beaucoup plus pour mon existence en tant qu’homme, que mes pulsions de base. Le problème de la définition de la masculinité en fonction de nos intérêts fondamentaux est que les hommes commencent à croire que c’est tout ce dont nous sommes capables. Malgré toute son influence sociale, l’impératif féminin n’a pas de véritable cadre de référence en ce qui concerne l’expérience masculine. Ainsi, dans son effort de marginalisation de la société masculine, en fait d’émasculation, son seul recours est de définir la virilité en fonction de ce qui diabolise le mieux la masculinité. L’Impératif ne peut pas permettre aux hommes de définir la masculinité pour eux-mêmes, donc la société définit les hommes, soit comme des bouffons ridicules qui ont besoin d’être « sauvés d’eux-mêmes » par les femmes, soit comme des êtres grossiers, des brutes, empoisonnés par la testostérone et toujours au bord de l’alcoolisme, facilement manipulables, toujours excités et prêt à baiser.

C’est ce que les hommes obtiennent dans leur « man-space ». Des nichons, du football, de la bière et des seins. Même dans leurs « cavernes d’hommes », c’est ce qu’une femme peut s’attendre à trouver. Laissés à eux-mêmes, les hommes transformeraient simplement le monde en une grandiose « Bro-Culture ». Nulle part vous ne trouverez des rêveurs, des leaders, des penseurs, des artistes ou des ingénieurs – dans le monde des filles, la majorité des hommes sont soit des porcs, soit des êtres endommagés.

Mais si l’impératif féminin représente quelque chose, c’est bien l’effacement et la contradiction de soi-même. Selon l’Impératif féminin, il n’existe que des aspects négatifs à la masculinité, et il est impossible d’accepter les hommes pour ce qu’ils sont, en bien comme en mal. Dans la société féminisée, la masculinité est invisible et indéfinissable ; les femmes pensent vraiment que les comportements masculins ne sont que des « masques » que les hommes se forcent à porter.

Alors qu’est-ce que la vraie masculinité ? Ne vous y trompez pas, la redéfinition confuse de la masculinité (par le féminisme) est en réalité un effort délibéré de contrôle social de la part de l’Impératif féminin. Il est facile de souligner sa mauvaise compréhension schizophrénique (ou sa déformation intentionnelle) du masculin, mais les hommes ont involontairement adopté et renforcé leur propre confusion des rôles. Soit en adoptant le mensonge de la « Bro-Culture », soit en souscrivant en bloc à l’identification féminine de ce que devrait être la masculinité, les hommes sont complices, car ils ne définissent pas la masculinité par et pour eux eux-mêmes.

Comprenez cela maintenant : une société centrée sur la femme veut vous faire croire que la masculinité est une affaire de mecs qui se retrouvent dans des fraternités minables, des simples buveurs de bière. Une société centrée sur la femme ne peut pas se permettre de permettre aux hommes de définir eux-mêmes leur masculinité, car elle projette ce profond besoin féminin de sécurité et de contrôle sur les hommes auxquels elle ne peut pas faire confiance en raison de la définition même de la « féminité » qu’elle encourage pour son propre contrôle.


Source : « Beer and Boobs » publié par Rollo Tomassi le 15 juillet 2013.